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L’économie de l’école numérique : un marché en formation
Le monde de l’éducation est géré par l’État et le ministère de l’Éducation nationale bénéficie du plus important budget de l’année 2021. La loi de Refondation de l’école de la République, dite loi Peillon, a changé le système de financement des établissements scolaires.
L’État assure toujours les dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique. Mais depuis 2013, les communes pour les écoles, les départements pour les collèges et les régions pour les lycées ont à charge l’acquisition et la maintenance des infrastructures. Le matériel numérique et les logiciels entrent dans ce périmètre.
Divers investissements sont lancés par les gouvernements successifs pour faire bouger les lignes. Il en va ainsi de l’enveloppe de 105 millions d’euros destinée à équiper les écoles primaires d’un socle numérique de base, dans le plan de relance 2021.
Les plans d’investissements de l’État dans le numérique éducatif sont régulièrement pointés du doigt par la Cour des comptes.
Selon l’institution, ces investissements accentuent les inégalités territoriales. Les financements donneraient l’avantage à des collectivités déjà équipées ou préparées à répondre à des appels à projets organisés dans le cadre du Programme d’investissements d’avenir (PIA). Les collectivités en difficulté seraient laissées sans soutien adapté.
La Cour des comptes dénonce également une politique de financement à travers des crédits ponctuels. Elle préconise plutôt des crédits structurels, qui engagent des changements sur le long terme.
Selon ses chiffres, antérieurs à la crise sanitaire, les équipements individuels (tablettes, ordinateurs portables) représentaient des dépenses qui s’établissaient en moyenne à 34,5 € pour un écolier de l’école élémentaire, à 77 € pour un collégien, et à 82 € pour un lycéen.
Les investissements publics en faveur du numérique éducatif ont beaucoup progressé sous l’action conjuguée des trois niveaux de collectivités, pour 2 Md€ de 2013 à 2017, et de l’État, pour 300M€ sur la même période, alors que son engagement initial était annoncé à hauteur d’1 Md€ d’euros.
Cet engagement fort n’a pas suffisamment réduit la fracture numérique sociale et masque d’importantes disparités territoriales. En effet, le financement des petites communes reste trois fois inférieur à celui des grandes et les départements les plus fragiles sont majoritairement ruraux.
Le terme anglicisé EdTech regroupe l’ensemble des nouvelles technologies qui permettent de faciliter l’enseignement et l’apprentissage. La filière française de l’EdTech propose des solutions innovantes très compétitives par rapport à des produits du marché américain par exemple. Mais dans la majorité des cas, ces entreprises n’ont pas la taille critique pour se développer à l’international.
Marc Sagot, secrétaire général de l’Afinef, qui regroupe les entreprises du numérique pour l’éducation et la formation, fait un bilan du secteur. « Pour beaucoup de nos entreprises, la Covid a constitué une opportunité de se faire connaître », explique-t-il.
Le recours au freemium, qui consiste à mettre gratuitement à disposition une ressource pendant un temps donné, a rencontré un grand succès lors du premier confinement. « Or le taux de transformation a été plutôt faible. La période a surtout profité aux acteurs dont les solutions étaient déjà efficientes et bien identifiées sur le marché », précise Marc Sagot.
La filière étant principalement composée de TPE, celles-ci sont aujourd’hui dans l’obligation de signer des contrats, au risque de disparaître sans avoir pu transformer l’essai.
Dans le rapport ministériel sur la structuration de la filière du numérique éducatif, il est souligné que « le développement d’une filière française des EdTech est un gage de souveraineté qui permet de préserver le modèle français d’éducation, face à la domination croissante du modèle anglo-saxon ».
Or l’investissement public dans le numérique français reste faible par rapport aux autres pays développés. Il l’est surtout par rapport aux investissements que peuvent faire des géants du numérique comme les GAFAM, qui occupent une place quasi monopolistique dans ce secteur.
Les acteurs publics de l’éducation ont longtemps été habitués à utiliser des ressources pédagogiques produites par des services ou des opérateurs de l’État (CANOPé, le CNED et désormais PIX…) ou par des éditeurs scolaires « historiques ».
Depuis quelques années, ils ont vu se multiplier les offres de services et de produits numériques éducatifs dans un secteur de plus en plus marchandisé. Parmi eux, la suite idruide Éducation, qui comprend un environnement synergique pour animer la classe mobile et administrer un parc informatique.
Pour s’y retrouver et consolider ce secteur de l’EdTech France, plusieurs de ses acteurs s’unissent et organisent des sessions de réflexion avec le ministère de l’Éducation nationale et la Banque des Territoires.
« Nous souhaitons porter l’offre au plus près du besoin des enseignants », explique Marc Sagot. « Nous réfléchissons donc à la mise en place d’un Pass’ Éducation, qui leur permettra d’accéder facilement à des solutions numériques (ressources, services associés et objets numériques pédagogiques) pour leur travail », conclut-il.